Marco Polo

La barbe fournie, c’est un Marco Polo en pleine force de l’age qui commande son navire. Séparé des autres bateaux du convoi, il espère rejoindre Venise, la puissante principauté sous le pavillon de laquelle il vogue. Mais la flotte génoise les intercepte et extermine l’équipage. Blessé, affaibli, Marco Polo est enfermé dans la prison de gêne pendant l’hiver 1298. Son compagnon de cellule est un écrivain de Pise, Amedeo Rusticello. Pendant plus de 9 mois, celui-ci va écrire les incroyables récits de Marco Polo, qui aurait vécu 17 années en Chine et en serait revenu. Des récits qui viennent jusqu’aux oreilles de l’église, qui s’insurge et insiste pour que Polo avoue le mensonge. L’écriture de Amedeo étant illisible, deux prêtres venus enquêter lui demandent de lire ses notes. Son récit débute à la naissance de Marco Polo à Venise, en 1254. Son père Niccolo est parti pour la Perse avec son oncle Matteo avant sa naissance et n’a plus donné de nouvelles depuis. Fasciné par les voyages, le jeune garçon est bercé par les récits des marins, désespérant qu’un jour son père revienne. Le miracle se produit pendant l’été 1269. Niccolo revient avec une mission : il est devenu l’ambassadeur du grand Khan, Kubilai, désireux de rentrer en contact avec le monde chrétien. Marco Polo a 17 ans lorsqu’il accompagne son père, reparti pour la cour du grand Kahn. Ignorant qu’il ira bien plus loin que lui…

Il est entendu que la réalisation est bien celle d’une production des années 80 pour la télévision. Le récit s’ouvre sur un abordage assez symbolique, suivi d’un massacre bien sage, loin d’une vision hollywoodienne. Mais la volonté de crédibilité, notamment au niveau des décors et des costumes, et surtout le soin apporté à resituer clairement chaque acteur de ce récit, de dissocier chaque étape de ce destin d’exception, tout ce travail force le respect. Bien qu’assez bavard, le récit est toujours efficace, plus de 15 ans après sa diffusion. Et les moyens considérables qui ont été mis en œuvre restent impressionnants. Battant le record de budget de l’époque, la série est tournée en 35 mm avec des moyens de cinéma, souvent sur les lieux même de l’histoire. Cette production fut d’ailleurs la première à se voir ouvrir les portes de la mythique Cité Interdite de Pékin. Pour donner du corps à l’interprétation, la distribution s’offre quelques acteurs de légende comme Burt Lancaster, F. Murray Abraham ou John Gielgud. En 10 heures d’images, le récit ne se contente pas de suivre les pas de l’explorateur. Il replace le jeu des influences entre les arrogantes principautés maritimes, l’attitude des dignitaires de l’église catholique en l’absence d’un pape…

Romancée juste ce qu’il faut, l’épopée est intime, et sa réelle dimension humaine donne toute sa valeur à la reconstitution. La mini-série à l’intelligence de ne pas se réduire à son héros magnifique, à ne pas se focaliser sur le spectaculaire. On comprend les données politiques et géographiques, pourtant complexes à une époque où le pouvoir était morcelé. Le récit est solide, bien amené et toujours aussi prenant sitôt que Rusticien de Pise entame son récit. La dimension universelle de Marco Polo est aussi très bien représentée, sa curiosité comme son respect des cultures lointaines. Un humaniste fascinant dont le message, plus que jamais d’actualité, tient en une phrase : la peur vient de ce que l’on ne connaît pas. Il était temps que cette mini-série de référence soit éditée en DVD. De par sa longueur, il conviendra d’organiser sa découverte pour le jeune public, mais ses vertus pédagogiques restent les mêmes. Et si certains regretteront un certain manque d’action (Marco Polo était un explorateur, pas un guerrier…) le souffle de l’épopée fait encore son effet. Le coffret de 4 DVD contient d’ailleurs un petit livret informatif sur les lieux et les acteurs de l’aventure. Quitte à rectifier quelques fausses vérités qui ont la vie dure : pâtes et vermicelle existaient en Italie bien avant le retour de Marco Polo à Venise… De ce genre de repères bien pratiques lorsque la jeune classe pose des questions ! Le coffret comprend un seul bonus, 28 minutes d’interview du réalisateur, destiné aux plus grands. Il faut noter que cette version est la plus longue qui existe de la série. En raison de ce montage différent, l’édition ne comprend pas de version originale sous-titrée.