La guilde

{xtypo_dropcap}A{/xtypo_dropcap}vec son atmosphère qui fleure bon le complot, le romanesque d’un moyen-âge décalé et ses personnages étonnants de vie, La guilde est une bande dessinée qui a encore beaucoup à nous apprendre mais qui a réussi à nous séduire très vite. Du genre d’album que parents et enfants peuvent se disputer…

Astraban a l’avenir devant lui. Ce jeune homme parfois trop candide fête son admission à la célèbre académie d’alchimie avec toute l’insouciance de son âge. Bien que maladroit, il est des plus fougueux, et le prouve au sortir de la fête en volant au secours d’une belle en grand danger. Un sauvetage digne d’éloge qui ne lui rapporte pourtant que des ennuis, et des plus périlleux. Ses amis proches se font massacrer par de mystérieux poursuivants acharnés auxquels Astraban n’échappe que de justesse. Il trouvera son seul refuge chez celle qu’il a sauvé. Et avec elle, il va découvrir un autre monde : la Guilde, organisation qui règne sur la ville, les traffics et le pouvoir. Il y trouvera l’amour, le respect et une bonne place auprès du seigneur Braezel, qui règne sur la ville. Mais une simple erreur suffit à tout changer, et Astraban va vite découvrir les coulisses de ce pouvoir dont il va profiter avant d’en être cruellement exclu…

Depuis l’indéboulonnable Mickey, et toute l’école Disney, les personnages reprennant les traits des animaux ont toujours eu une place de choix dans la BD. Un anthropomorphisme souvent associé à la petite enfance par le caractère simpliste des personnages. Certains ont su détourner cette vision caricaturale au profit d’un esprit plus mature à l’exemple de l’inspecteur Canardo de Sokal, mais récemment, des auteurs inspirés ont su utiliser ce genre pour s’accomplir dans des univers très personnels. Et sans atteindre l’excellence du polar noir de BlackSad, les auteurs de cette Guilde tirent leur épingle du jeu avec une belle réussite. Formé à l’animation dans les studios Warner, le dessinateur espagnol Oscar Martin signe là sa première série, et sa maîtrise des attitudes et des expressions, quelque peu poseuses, fait merveille. A découvrir son style soigné, on pense aux dessins animés de Don Bluth (Brisby, Fievel) ou à certains Disney comme Robin des bois. Dynamisé par un style vif et maîtrisé, l’héritage Disney est respecté.

Si le style de dessin implique que l’on discerne au premier coup d’œil le gentil du méchant, l’histoire concoctée par Miroslav Dragan crée à l’inverse un univers trouble à souhait. Dans cet étrange moyen-âge où l’Alchimie est une science officielle, Dragan recrée une société avec toutes ses vicissitudes, des ambitions politiques à l’omniprésence de la mafia. Une peinture noire et romanesque, un cadre idéal pour multiplier les trahisons, et les coups de théâtres. Et s’il est difficile de suivre le second volume sans avoir lu le premier, si l’on passe parfois un peu rapidement d’un événement à l’autre, il est très facile d’être séduit par les mystères de La Guilde. On peut désormais espérer que les intrigues tiennent leurs promesses et parvienne à égaler en inventivité et en dynamisme le dessin de Martin, l’atout premier de la série.

Frédéric Lelièvre

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