INTERVIEW > PEOPLE > Interview du réalisateur de la série TV de Noël sur M6


{tab=INTERVIEW}
{mosimage}
17 décembre 2007 : {show_category} > PEOPLE

Tandem, Les spécialistes, la série référence Crimes en série avec Pascal Legitimus : le scénariste et réalisateur Patrick Dewolf a acquis à la télévision et au cinéma un savoir-faire reconnu. Le retrouver aux commandes d’un projet innovant comme La légende des trois clefs n’a donc rien d’étonnant.

{mosimage}Top-Parents : En tant que réalisateur et co-scénariste, avoir trois enfants en première ligne, cela change tout ?
Patrick Dewolf : Tout à fait! Même si ceux-là ont 13 ans, la législation ne nous autorise à tourner que quatre heures par jour avec des enfants. Tout de suite, dès l’écriture, il faut se débrouiller pour écrire une histoire dans laquelle ils ne seront pas tout le temps ensemble. Cela implique aussi un plan de travail qui a été assez compliqué à mettre en place

T.P. : Pourtant, les trois enfants sont très souvent à l’image ?
P.D. : C’est une question d’organisation dès le début de l’élaboration. Le tournage est un mécanisme d’horlogerie assez compliqué. Et puis surtout, il ne faut pas se tromper lorsqu’on les choisit ! Sinon, on est foutu…

T.P. : La légende des trois clefs nous fait aussi beaucoup voyager dans des décors naturels étonnants. Le travail de repérage est un bel atout de la série !
P.D.: Nous avons travaillé longtemps là-dessus. Je ne connaissais pas beaucoup le Poitou Charente. J’y ai découvert une richesse de paysage incroyable ! On a pu compter sur un garçon exceptionnel qui s’occupait des repérages et qui avait aussi une grande culture sur les templiers. C’est pour cela qu’il a pu nous trouver les bons décors. Il fait dire que nous n’avions pas beaucoup d’argent non plus, il fallait trouver des combines !

T.P. : Mettre en avant les personnages de trois enfants implique qu’il s’agit d’un spectacle familial ?
P.D. : Oui, et c’est ce qui m’a plu. Une histoire où on ne se prend pas trop la tête, une intrigue ludique. C’est un film que j’ai fait pour mes enfants, en pensant que pour cette fois on pourrait le regarder ensemble !

T.P. : Comment peut-on définir le « spectacle familial », surtout pour la télévision d’aujourd’hui ?
P.D. : Là vous avez raison, c’est délicat ! Cela dépend tellement de la culture de chaque famille… Disons, que c’est quelque chose qui doit d’abord être agréable à regarder, qui ne nécessite pas une réflexion intellectuelle démesurée. On est dans l’aventure. C’est un code à respecter : pas de scène de sexe trop appuyée, pas de violence avec des gens qu’on va zigouiller en faisant gicler du sang partout. Ce doit être un spectacle avec comme dénominateur commun qu’un petit garçon de 8 ans puisse le regarder.

T.P. : C’est tout à fait le cas de La légende des trois clefs… à l’exception d’une seule scène, une étreinte amoureuse assez torride. Une scène démonstrative décalée du ciblage ?
P.D. : Oh oui je vois laquelle! Ma foi, peut-être un peu. Mais ça reste assez pudique, on a tourné tout ça dans l’obscurité. Mais ça n’est pas faux ! Peut-être que cette scène est un peu forte. Ceci dit, on ne nous a rien dit à ce propos. Car vous vous doutez bien que le film a été visionné, validé. M6 prend grand soin de son public, notamment du plus jeune. De plus, il fallait que cette scène choque un peu, puisqu’elle déclenche quelque chose d’irrémédiable pour le personnage de Julie. C’est ce qui la décidé à quitter son mari. Scénaristiquement, c’est justifié. Etait-ce trop ? Je ne sais pas. Cela reste très suggéré.

T.P. : Pour La légende des trois clefs, doit on parler de série ou de suite de téléfilms ?
P.D. : C’est une série! Une seule et même histoire. Si on met les films bout à bout, tout s’enchaîne sur trois jours bien remplis. C’est le principe de la série, et c’est ce qui est si génial à la télé. Vous pouvez raconter une histoire avec du temps pour faire évoluer les personnages, creuser les personnalités, bien cerner leurs rapports…

T.P. : Est-ce un format idéal pour raconter une histoire riche sans tomber dans la série de 15 ou 20 épisode ?
P.D. : Oui ! C’est la grande différence d’avec le cinéma, moi qui ai eu la chance de faire les deux. A la télé, vous avez la possibilité d’avoir une, deux, trois soirées pour raconter une histoire, que vous n’auriez pas pu présenter aussi bien en 1h30 au cinéma. Je travaille pour France 3 sur un projet racontant l’occupation au quotidien dans une petite sous préfecture. Et nous allons faire ça sur des formats de 52 minutes, mais sur des dizaines d’épisodes si ça marche! Une opportunité que vous n’aurez jamais au cinéma. Pourvoir capter l’attention avec des personnages intenses, raconter tout doucement, avoir un positionnement critique très différent, plus profond…

T.P. : Une série mêlant action et fantastique avec trois enfants parmi les premiers rôles, on n’aurait probablement pas osé le faire voici seulement quelques années. Est-ce une évolution logique face à des séries américaines qui ont instauré un idéal de fiction beaucoup plus audacieux, et un public qui est devenu plus exigeant ?
P.D. : Exactement. Il ne faut pas qu’on se ringardise ! Le monde bouge vachement, il faut que notre télé suive tout ça. La narration a évolué énormément. En l’espace de 20 ans, on ne raconte plus un mec qui sort de bagnole et rentre chez lui de la même façon. Aujourd’hui, on a un plan sur le gars au boulot, et le plan suivant il est chez lui. On ne le suit plus prendre sa bagnole, remonter la rue… ce sont de petits détails mais révélateurs. Et c’est sur qu’avec leurs moyens, les séries américaines ont mis la barre très haut.

T.P. : Lorsque vous écrivez pour la télé, vous pensez à tous les ciblages de spectateur ?
P.D. : Lorsqu’on écrit, il faut partir d’une envie, d’une sincérité. Ne pas trop réfléchir sur qui cela va intéresser. C’est ensuite qu’on voit le ciblage, avec la chaîne de télé. Faire une télévision segmentée, concentrée sur un seul type de ciblage, c’est une autre démarche. Et puis à force de vouloir plaire à tout le monde, on finit par faire des trucs bien fades ! Il est évident que lorsque nous avons écrit cette histoire, nous voulions faire un film pour le plus large public. Je pensais à mon fils de 11 ans qui peut s’intéresser à une pareille aventure. Maintenant, mon fils n’est pas représentatif de tous les enfants de France de 11 ans! Mais il est évident que ces générations d’enfants sont beaucoup plus évoluées, beaucoup plus ouvertes et attentives que nous ne l’étions à leur age. Ils emmagasinent les informations beaucoup plus vite, ils sont plus « adultes » que nous ne l’étions.

T.P. : Et quelles ont été vos relations sur le plateau avec les trois jeunes acteurs ?
P.D. : Ça a été une aventure formidable. Humainement d’abord, parce que ce sont trois êtres humains vraiment super. J’avais beaucoup parlé avec leurs parents avant, je ne voulais pas que ce soient des petits clowns, avec des parents qui les obligent à faire ce métier. Je voulais qu’ils aient vraiment envie. D’autant que si Manon a déjà l’habitude des tournages, les deux autre n’avaient jamais fait ça de leur vie. Ils ont assuré trois mois de tournage, c’est énorme pour des enfants. Ils découvrent que c’est un vrai boulot, intense. Mais ça les a passionné. Comme ils sont plutôt brillants, chaleureux, ils nous ont fait part de toutes leurs réactions. Nous avons fait beaucoup de lecture avant de tourner, et aussitôt c’était « moi, je dirais pas ça comme ça »! Et puis avec les deux Julie et Thierry, toute la petite bande se remettait en question. Bien sur, l’histoire était écrite, mais une fois dans les décors, ça n’était jamais comme on l’avait imaginé. Du coup les enfants réagissaient, et on s’adaptait.

T.P. : Et même les deux débutants se sont vite sentis à l’aise ?
P.D. : Au début c’était rigolo ! Souvent, on fait jouer un acteur qui parle à un partenaire qui n’est pas là. Et eux n’y arrivaient pas, parce que justement qu’il n’y avait personne. Il a fallu leur apprendre quelques trucs, quelques combines, mais je peux vous dire qu’ils ont pigé très vite. En 48 heures, ils ont tout capté. Julien, il est comme ça dans la vie, énergique, instinctif. Et Paul est déjà très réfléchi, tourmenté… On dit toujours que « ce tournage a été un bonheur », mais là c’est vrai. D’autant que c’était un pari. Un script ambitieux, difficile, avec très peu de moyen. Mais les enfants étaient toujours disponibles, de bonne humeur, et puis Julie et Thierry c’était un bonheur aussi ! Pour des acteurs, travailler avec des enfants est toujours délicat. Mais il y a eu tout de suite entre eux une entente, un respect mutuel formidable.

T.P. : En tant que raconteur d’histoire, qu’est-ce qui a changé à la télévision ?
P.D. : D’abord, les budgets se sont réduits. Les conditions de travail sont plus difficiles. Nous avons de moins en moins de jours pour faire des miracles ! Ca change la façon de tourner. On y arrive parce que les contraintes nous stimulent, mais nous vivons un passage un peu délicat, toujours en limite. Avec les 3 clefs, nous étions toujours à la limite. Mais avec notre débrouille, quand on voit le résultat, ça ne fait pas trop « pauvre ». Il faut penser qu’en face, nous avons des séries américaines qui vendent dans le monde entier. La légende des trois clefs est un concept audacieux, c’est ce qui m’a séduit. Et même si nous faisons cela avec notre système D, nous allons dans le bon sens.

T.P. : C’est donc lorsque le public est plus exigeant que vous avez moins de moyen ?
J.C. : Oui ! C’est un phénomène complexe. Les séries françaises ne cartonnent pas follement, et tout cela est très économique: si personne ne regarde ces séries, on ne va pas leur donner d’argent. Mais l’argent n’est pas tout. Il faut aussi prendre le temps de faire de bons scripts, et prendre surtout le temps de les développer correctement ! Ce que l’on oublie trop en France. Mais il y a suffisamment de gens sérieux qui aiment faire les choses bien pour qu’on y arrive !
{tab=ARTICLES LIES}
{mosmodule module=Related News}
{mosmodule module=Related Tests}
{mosmodule module=Related Dossiers}
{mosmodule module=Related E-mag}
{mosmodule module=Related Videos}
{/tabs}

Julien Crampon et la légende des trois clefs

Article précédent

Je suis belle comme maman

Article suivant

Vous aimerez aussi

Commentaires

Commentaires fermés

More in Actualité